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L’EMG de surface au service de la détection précoce des inhibitions motrices

Temps de lecture : 9 minutes Jeudi 7 Mars 2024
L'EMG classique : incompatible avec le biofeedback du transverse ?

Les prises en charge des « inhibitions motrices » sont de plus en plus fréquentes pour les kinésithérapeutes ces derniers temps.

En soi, l’inhibition motrice est un phénomène sain, contrôlé par le système nerveux, qui permet d’ajuster et d’optimiser la motricité au sens large. Dans le domaine de la rééducation, ce terme devient de plus en plus présent car on parle des cas où on retrouve comme un dysfonctionnement dans la gestion de ces inhibitions. Ce phénomène complexe est le résultat de différentes compensations au niveau du système nerveux, que ce soit spinal ou central.

Dan ce cas, les inhibitions motrices font référence à un phénomène dans lequel la fonction motrice d’un muscle ou d’un groupe musculaire est temporairement réduite ou supprimée. Ces inhibitions peuvent être causées par divers facteurs, notamment des lésions nerveuses, des déséquilibres musculaires, des processus inflammatoires ou des dysfonctionnements du système nerveux central ou périphérique. Elles peuvent se manifester sous différentes formes, telles que des réponses musculaires affaiblies, des retards dans l’activation musculaire, ou même une incapacité totale à activer un muscle donné.

 

Étude de cas : L’inhibition motrice du quadriceps

Prenons l’exemple de l’inhibition motrice du quadriceps, car particulièrement connu des kinésithérapeutes, en particulier chez les patients pris en charge après une blessure et/ou une opération du genou. On parle souvent d’Arthrogenic Muscle Inhibition (AMI), décrit comme l’incapacité durable d’avoir une activation motrice correcte du quadriceps. Le tableau couramment observé sera alors une inhibition motrice du vaste médial oblique (VMO), parfois associée à un déficit d’extension secondaire et à une contracture réflexe des muscles ischios jambiers. Ces phénomènes doivent être repérés le plus rapidement possible, aussi bien en préopératoire (pour éviter une raideur post-opératoire), qu’en post-opératoire , afin de limiter les effets à long terme, et d’optimiser la rééducation. Les AMI constituent un frein majeur à la rééducation car elles accentuent l’amyotrophie, l’instabilité articulaire, la douleur et retardent ou bloquent le retour à la motricité, malgré une rééducation bien conduite.

Il est donc fondamental de pouvoir repérer, classer et traiter l’AMI chez les patients après une blessure et/ou une opération du genou.

Le repérage.

Comment repérer une AMI? L’EMG de surface s’avère être un outil efficace et extrêmement pratique.

Le bilan diagnostic différentiel des AMI est mis en évidence grâce à des étapes simples.

La sidération du quadriceps est évaluée :

  • Visuellement, par la comparaison de la qualité de contraction du quadriceps en regard du membre controlatéral,
  • Par l’incapacité du patient à se mettre en recurvatum actif
  • Par une différence d’activité musculaire objectivée par EMG de surface.

La contraction réflexe de l’ischio jambier est objectivée visuellement en mettant le patient en décubitus ventral, afin de pouvoir observer facilement la contraction musculaire.

Depuis 2022, l’équipe de Lyon, menée par les travaux du Dr Bertrand Sonnery-Cottet, publie la première classification de l’AMI en 4 grades.
  • Grade 0 : Contraction normale du VMO.
  • Grade 1 : Inhibition motrice du VMO sans déficit d’extension du genou
  • Grade 2 : Inhibition motrice du VMO associée à un déficit d’extension du genou due à une contracture réflexe des ischios jambiers.
  • Grade 3 : Déficit chronique d’extension passive due à la rétraction de la capsule postérieure.
Ce travail permet de guider les praticiens dans la détection, la caractérisation et la prise en charge des AMI.

L’apport du biofeedback EMG dans la prise en charge.

Le réentrainement du muscle est fondamental.
Encore une fois, l’EMG de surface permet d’accompagner au mieux le patient et de lever cette inhibition plus rapidement et plus efficacement. L’objectif n’est pas uniquement de récupérer la force musculaire, mais surtout de rétablir la confiance dans sa capacité à engager le muscle dans des situations fonctionnelles, et ceci, sans appréhension.
Des résultats récents ont montré comment le biofeedback offert avec des solutions EMG pouvait augmenter l’excitabilité motrice corticale, qui est diminuée chez les personnes souffrant d’une ACLR.(155, 24,39).  L’étude de Christanell a montré l’avantage de mener un programme d’exercice thérapeutiques guidé par biofeedback EMG chez les patients souffrant d’une ACLR, en comparaison avec des patients effectuant les mêmes exercices mais sans visualisation EMG en retour (159). En outre, le réentraînement à la marche guidé par biofeedback EMG a été testé avec succès pour obtenir une biomécanique de la marche plus optimale à la suite d’une ACLR.160,161.

Comment fait-on en pratique avec l’EMG de surface?

L’EMG de surface peut donc permettre de visualiser l’activation musculaire du vaste médial pendant les tests et pendant les exercices de réentrainement.
Plusieurs éléments à prendre en compte pour mettre en place la mesure:
– Bien placer vos électrodes.
– Penser a enregistrer des mesures de MVC (Maximum Value Contraction) afin de pouvoir comparer les mesures d’un jour à l’autre
Le placement des électrodes: le SENIAM (Surface ElectroMyoGraphy for the Non-Invasive Assessment of Muscles) est une action concertée européenne qui avait été menée dans le cadre du programme de santé et de recherche biomédicale (BIOMED II) de l’Union européenne. Cette action a aboutie à l’établissement de recommandations globales sur la mise en place de l’EMG de surface et permet de donner en accès libre un certain nombre de ressources précieuses. On y retrouve ne particulier des fiches qui détaillent le placement optimal des capteurs en fonction du muscle que l’on cherche à investiguer. Pour le Vaste Médial, le SENIAM recommande donc de placer les électrodes à 80 % sur la ligne entre l’épine iliaque antéro-supérieure et l’espace articulaire devant le bord antérieur du ligament médial.

La mesure de la MVC: pour le vaste médial, la MVC peut se mesurer en réalisant une extension de jambe (sans rotation de hanche) sous contrainte maximale, cette contrainte étant appliquée juste au-dessus de la cheville, dans la direction opposée à l’extension. Ce mode opératoire est celui recommandé par le SENIAM. La contrainte maximale sera appliquée soit manuellement par le kinésithérapeute, soit manuellement, avec l’aide d’un élastique accroché à un point fixe, soit via un système isocinétique.

Aujourd’hui, il existe plusieurs solutions adaptées aux kinésithérapeutes et à la routine de cabinet. Chez Blueback, nous proposons l’EMG-4000, utilisable avec le Blueback Physio et permettant de mesurer 2 voies en même temps, tout cela totalement inclu dans l’application Blueback.
Il existe également des capteurs sans fils avec des solutions de visualisation et d’analyse ergonomiques comme le K-myo, les capteurs E.M.I.L, la solution de chez DELSYS, la solution mDurance ou encore le MuscleBan.

Bibliographie:

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